LICENCIÉS DE SAIPEM SA : 91 TRAVAILLEURS SÉNÉGALAIS DÉNONCENT UNE DÉCENNIE DE « DÉNI DE JUSTICE » ET INTERPELLENT L’ÉTAT
La place des cultures urbaines sise à Grand Yoff a affiché comble ce mardi avec le Collectif des 91 travailleurs sénégalais licenciés de la multinationale SAIPEM SA qui a lancé un cri du cœur, marquant les dix ans d’un combat judiciaire qu’ils estiment « inique et partial ». Face aux médias, ils ont exposé une saga judiciaire complexe et ont appelé au patriotisme des nouvelles autorités sénégalaises pour enfin obtenir justiceLe litige remonte à 2016, lorsque 91 pères de famille, certains cumulant plus de trente ans d’ancienneté au sein de l’entreprise (anciennement BOUYGUES OFFSHORE), ont reçu des lettres de licenciement pour motif non économique, attestant simplement que « la société n’avait plus besoin de leurs services ». Une rupture unilatérale de contrat, affirment-ils, effectuée sans le versement des indemnités légales prévues par le Code du Travail.
S’en est suivie une longue et épuisante bataille devant les juridictions sénégalaises. D’après le collectif, ce parcours fut jalonné de décisions pour le moins déconcertantes. La plus contestée reste celle de la Cour d’Appel en avril 2021, confirmée par la Cour Suprême en 2022. La justice, tout en reconnaissant l’existence d’un contrat à durée indéterminée pour une partie des plaignants, a jugé leur action irrecevable. Le motif : un procès-verbal de conciliation partielle datant de… juin 2008, qui aurait, selon la Cour, mis fin à toute relation de travail entre les parties.
C’est là que réside l’incompréhension et la colère des ex-employés. « Comment la justice peut-elle recevoir une plainte avec des lettres de licenciement de 2016 et prétendre que nous n’avions plus de relation de travail avec SAIPEM depuis 2008 ? », s’est interrogé le porte-parole du collectif. Pour preuve de leur bonne foi, ils brandissent non seulement les lettres de rupture de 2016, mais aussi des bulletins de salaire, des contrats de travail et même des certificats de travail délivrés par l’entreprise bien après 2008.
Convaincus que « SAIPEM SA bénéficie de connivences dans les circuits judiciaires sénégalais », les travailleurs licenciés ont étayé leurs propos en citant plusieurs condamnations de l’entreprise en France pour des faits similaires. Ils ont notamment fait référence à des arrêts des Cours d’Appel de Versailles, de Douai et d’Aix-en-Provence, datant de 2022 et 2024, pour démontrer que leur cas ne serait pas un incident isolé.
Aujourd’hui, à bout de recours légaux au Sénégal, le collectif place ses espoirs entre les mains du nouveau gouvernement. « Nous en appelons au patriotisme des autorités sénégalaises pour qu’ils nous aident à rentrer dans nos droits », a déclaré le porte-parole. Au-delà de leur cas personnel, ils exhortent l’État à faire preuve d’une vigilance accrue pour « détecter précocement de tels prédateurs afin de les mettre hors d’état de nuire » et protéger à l’avenir les travailleurs sénégalais contre des pratiques jugées abusives.
