Homme d’affaires influent, infaillible et indéboulonnable, Vincent Bolloré a su faire équipe avec tous les présidents des dernières 30 années de la 5èmes république française. Ainsi de Mitterrand à F. Hollande en passant par Jacques Chira et Nicola Sarkozy. Il a toujours obtenu le privilège de voyager aux côtés du président en déplacement vers l’Afrique, terre conquise.
C’est ainsi que lors des dernières années, Bolloré est magistralement concessionnaire, détenteur exclusif et parfois constructeur de plus de 15 ports très lucratifs en Afrique, en particulier en Afrique de l’Ouest. Le port de Lomé, de Douala, d’Abidjan, de Cotonou, de Yaoundé, de Lagos, de Dakar, de Conakry sont tous entre les mains de Bolloré Africa Logistics. Au total, on peut le repérer dans 41 pays Africains. Le précieux reportage de Benoît Collombat, diffusé le 29 mars 2009 et intitulé Cameroun, l’empire noir de Vincent Bolloré, avait lancé une controverse sur certaines activités africaines du groupe, qui soutient la fondation de Chantal Biya, épouse du président Camerounais Paul Biya, ainsi qu’une radio tenue par un prêtre proche du pouvoir. Cette controverse fût relayée, notamment, par le très sérieux organe de presse Médiapart.
Cependant, petit bémol : après le désastre de l’accident meurtrier du train de la société Cam rails, filiale de Bolloré Africa Logistics, Bolloré replonge dans une nébuleuse affaire de trafic d’influence, d’abus de pouvoir et de confiance en Guinée. Il s’agit du contrat décroché par Bolloré sur le port de Conakry. Un appel d’offre saisi par Necotrans puis arraché et transmis gré à gré à Bolloré par Alpha Condé nouvellement élu président en 2010. Ce dernier suspendit un contrat de 25 ans dument et légalement obtenu par Necotrans. Aujourd’hui, la justice française s’est saisie de l’affaire et procédé à la garde à vue et la mise en examen du prévenu. Ce qui a constitué une rare victoire pour les peuples africains, les journalistes d’investigation, les activistes et les ONG qui n’ont cessé de dénoncer les mauvaises pratiques d’un puissant homme aujourd’hui impliqué dans plus de 10 domaines d’activités économiques.
Pour le port de Lomé (Togo) le schéma est quasiment identique à celui de la Guinée Conakry. Havas s’est occupé de la communication de Faure Gnassingbé, candidat à la présidence de son pays, qui s’est empressé de leur remettre des concessions juteuses.
Voici les véritable goulots qui étranglent l’Afrique : des présidents comploteurs et suiveurs, des puissants hommes d’affaires étrangers, et des pays donateurs qui tordent la main aux présidents africains eux-mêmes auteurs de combines démagogiques gigantesques. Ces marchands de pouvoir sont devenus les tumeurs cancéreuses de l’Afrique.
La preuve de la chute vertigineuse de cet homme qui n’existe aujourd’hui que par son empire africain, s’illustre parfaitement en Italie et en France : Sa chaîne (Canal+) vient de perdre pour deux ans les droits du foot de la Ligue 1. Cet accident industriel pourrait lui coûter 2 millions d’abonnés. Alors que l’effritement de son audience l’a déjà contrainte à diviser le prix de l’abonnement par deux pour retenir ses clients. La fin des Guignols annoncée il y a quelques mois est venue confirmer l’acte de décès de «l’esprit canal», l’ADN de cette chaîne payante que Vincent Bolloré a progressivement vidé de sa substance en imposant sa férule.
S’il faut compter sur des hommes comme Bolloré pour se faire élire, il est évident que le pays lui appartiendra après et il dirigera d’une main basse le supposé président que les peuples ont élu. Les élections en Afrique, au lieu d’être un exercice démocratique sincère et propre, sont un désastre humanitaire.
Ansou SAMBOU