LETTRE OUVERTE À CEUX QUI CONSTRUISENT OU DÉNATURENT NOTRE PANORAMA MÉDIATIQUE. (Par Diadji KANE)

Il devient de plus en plus compliqué de garder le silence devant l’agonie progressive de notre écosystème médiatique.

Je m’exprime avec une grande peine, non pour choquer, mais par passion pour une société sénégalaise que j’ai toujours souhaitée forte, respectueuse, ambitieuse et brillante.

Il semble que, depuis un certain temps, une culture de la médiocrité se soit installée dans nos débats télévisés et nos rubriques. Le sensationnel a pris le pas sur la qualité. L’argument au bruit assourdissant. La vérité derrière les manipulations statistiques. L’obsession pour le culte de la « punchline ». Ce qui était censé être un lieu d’apprentissage populaire s’est transformé en une scène d’exposition où l’intelligence est dévaluée, où la diffamation, l’insulte et l’orgueil sont exhibés comme des insignes.

Pire encore, ce naufrage est constaté en toute complicité silencieuse de ceux qui, pourtant, ont le devoir de veiller à la régulation.

On dirait que le ministère de la Communication, qui est chargé de définir les grandes orientations d’un environnement médiatique sain, est déconnecté de la réalité.

Au milieu des discours technocratiques concernant l’intelligence artificielle, les pôles numériques et les révolutions digitales, on semble négliger l’élément crucial : l’aménagement humain, éducatif, éthique et culturel requis pour embrasser cette nouvelle ère technologique.

Quels efforts avons-nous déployés pour ancrer le numérique de manière robuste dans notre nation ? Quelle stratégie véritablement inclusive, éducative et ambitieuse a été mise en œuvre ? Il ne suffit pas d’utiliser des termes à la mode.

Lorsqu’une majorité de la population ne saisit pas les notions qui lui sont exposées, ce n’est plus une question de stratégie.

Autrefois des bastions de la vérité, nos médias paraissent maintenant esquiver les discussions sur les sujets clés : l’éducation, l’éthique, les Objectifs de Développement Durable (ODD), l’entrepreneuriat, la culture scientifique, l’innovation en milieu rural, le civisme… C’est à travers de tels débats que se construit une nation.

Mais ils ne sont pas là. Inaudible à la radio, imperceptible à l’écran.

On observe plutôt l’apparition de « détracteurs » davantage focalisés sur l’effet de mode que sur la cohérence politique.

Des individus autoproclamés qui dénigrent nos institutions tout en exigeant le respect. Des « influenceurs » qui normalisent la dépravation, l’indécence, la sottise. Comment prétendre construire une entreprise prospère si ceux qui crient le plus sont aussi ceux qui réfléchissent le moins bien ?

Je suis extrêmement préoccupé. Une portion du Sénégal est en état de maladie.

Souffrant d’un système de communication en fin de vie.

Atteint d’un ministère qui lutte pour remplir sa mission. Cependant, cette lettre est également un appel. Un appel à la jeunesse :

ne permettons pas qu’on nous vole notre temps, notre conscience et notre futur.

Rejetons la facilité. Rejetons l’indignité. Allons au-delà de nos écrans, de nos fils d’actualités et de nos filtres.

Le monde progresse rapidement, de manière très rapide. Et le temps, en effet, ne fait pas de pause pour nous. Il n’est pas encore trop tard. Cependant, il est nécessaire de passer à l’action. Restaurer la fonction de médiation au terme « média ». Rétablir la mission originelle du ministère. Et replacer l’éthique, la rigueur et la responsabilité au centre du discours public.

Pour un Sénégal jub, jubal, jubanti.

Diadji KANE

Directeur Général Gmax

 

 

 

 

 

 

 

 

Comments (0)
Add Comment