Depuis 2019, le Sénégal traverse une succession de crises qui, cumulées, ont profondément ébranlé nos certitudes, nos finances, nos institutions et jusqu’à notre vivre-ensemble. Tout a commencé avec l’irruption du COVID-19, une pandémie qui a mis à nu notre vulnérabilité et imposé à chacun une pression douloureuse. Sur nos vies. Sur nos revenus. Sur nos familles. Personne n’en est sorti indemne.
À peine avions-nous commencé à reprendre notre souffle que surgit le feuilleton Sweet Beauty. Un épisode sombre, fait de violences physiques et verbales d’une intensité rarement atteinte dans notre histoire récente. Le Sénégal se déchira. Deux camps se formèrent, hermétiques l’un à l’autre : les “patriotes” contre “les autres”. Les “bons” contre les “mauvais”. Les “saints” contre les “voleurs”. L’arène remplaça la République. L’émotion étouffa la raison.
Puis vint 2024. Une année décisive. Le peuple sénégalais, dans sa souveraineté absolue, décida de transférer son pouvoir à Bassirou Diomaye FAYE, le candidat porté par Ousmane SONKO. Beaucoup espéraient alors une accalmie, le temps de reconstruire le pays, de panser les blessures, de retisser le lien national. Mais au lieu de cela, nous avons assisté à la montée d’une autre vague : une croissance inquiétante de la haine, de la division, des pressions sécuritaires, économiques et sociales. L’espoir d’un apaisement céda progressivement la place au désarroi.
Chaque jour, le peuple attend une bonne nouvelle. Une seule. Elle tarde toujours à venir. Et chaque jour, le plat servi reste le même :
“Toumaal Macky vs Tontoul Macky”.
Des accusations répétées, jamais clairement établies. Des journalistes poussés vers l’antichambre de la liberté d’expression. Des entreprises en faillite. Des travailleurs licenciés. Une opposition qui joue le jeu du pouvoir en ne proposant aucune alternative crédible, se contentant de répéter le même slogan : Gatsa Gatsa.
À chaque fois que l’on croit entrevoir la fin des hostilités, à chaque fois que l’on pense enfin pouvoir nous pencher sur la demande sociale, sur la conjoncture économique difficile, sur la menace jihadiste qui frappe à nos portes, sur l’emploi des jeunes, sur l’émigration clandestine…
On nous sert un nouveau plat, encore plus pimenté de Gatsa Gatsa.
Et le comble : au moment où l’on s’y attendait le moins, le pays découvre un Gatsa Gatsa au sommet, opposant le Président de la République à son propre Premier ministre. Comme si la scène nationale avait besoin d’un nouvel épisode conflictuel.
Alors, à quand la fin ?
À quand la fin de l’instrumentalisation des rancœurs ?
À quand la fin de la politique spectacle ?
À quand la fin de la politique du clash permanent, qui consume notre énergie, notre économie, notre stabilité ?
À quand la fin de ce cycle infernal qui, depuis 2019, ne nous laisse aucun répit ?
Le Sénégal est un grand pays. Notre peuple a trop souffert. Trop patienté. Trop espéré. Il est temps de refermer ce chapitre de divisions et d’instabilité et de nous tourner vers l’essentiel :
la reconstruction, la cohésion, le travail, la sécurité, la prospérité, et l’unité nationale.
La vraie question demeure :
À quand la fin ? Et surtout, qui aura le courage de dire : “Assez. On arrête.” ?
NDIOL BAOL