En visite à la maison d’arrêt pour femmes ce lundi, la Ministre de la Justice a constaté un taux d’occupation de 154% et un chiffre alarmant : 87% des détenues sont en attente de jugement. Mme Yacine FALL a lancé un appel au système judiciaire pour « accélérer les dossiers ».
La maison d’arrêt pour femmes de Liberté 6 est au bord de l’asphyxie. C’est le constat sans appel dressé ce lundi par la Garde des Sceaux, Mme Yacine FALL, lors d’une visite de terrain destinée à « mieux appréhender les réalités du milieu carcéral ».
Après une première visite à la prison pour hommes de Rebeuss, la Ministre de la Justice a été confrontée à une situation de surpopulation critique : l’établissement, d’une capacité théorique de 100 places, accueille aujourd’hui 154 détenues.
La détention préventive, cœur du problème
Plus que le chiffre global, c’est sa décomposition qui révèle l’ampleur du dysfonctionnement. Sur les 154 femmes incarcérées, seules 20 ont été condamnées. Les 134 autres, soit 87% de l’effectif, sont des « prévenues », en attente d’un jugement.
Une situation que la ministre a qualifiée de « particulièrement difficile », pointant « la promiscuité et le surpeuplement » qui « portent atteinte à la dignité humaine ». Pour Mme FALL, la racine du mal à été identifiée : « la longueur des détentions préventives ».
Cette visite a été l’occasion pour la Garde des Sceaux d’avoir « une séance d’échanges très intense et très instructive » avec les détenues. Celles-ci ont soulevé « un certain nombre de problèmes structurels, mais aussi des problèmes qu’on peut régler dans le court terme ».
Des besoins spécifiques pour 3% de la population carcérale
La ministre a rappelé que les femmes, bien que ne représentant que 3% de la population carcérale sénégalaise, ont des « besoins spécifiques » consacrés par les instruments internationaux, notamment les « Règles de Bangkok » adoptées par l’ONU.
« Les femmes détenues doivent être protégées contre les abus, discriminations et violences », a-t-elle insisté, soulignant l’importance de l’accès aux soins, y compris la santé reproductive, et la nécessité d’une attention particulière pour les femmes enceintes et les mères accompagnées d’enfants. Des besoins que l’inadaptation des infrastructures et la surpopulation actuelle rendent difficiles à satisfaire.
Un appel pour « accélérer les dossiers »
Face à cette urgence, Mme Yacine FALL a annoncé des actions sur deux fronts. D’abord, la tenue imminente d’une « réunion avec l’administration pénitentiaire » pour identifier les « mesures qu’on peut prendre dans le court terme ».
Ensuite, et c’est là le fond du problème, elle a lancé un « appel aux maisons de justice, aux responsables de tout le système judiciaire, afin qu’on puisse accélérer les dossiers et répondre à l’éminente question de la surpopulation carcérale ».
Cette démarche s’inscrit dans la volonté de réforme affichée par l’exécutif. La ministre a rappelé l’engagement du Président Bassirou Diomaye FAYE et du Premier Ministre Ousmane SONKO, concrétisé par la tenue des Assises nationales sur la réforme de la justice en mai et juin ⁸.
« La question carcérale reste un défi central pour notre système judiciaire », a conclu Mme FALL, réaffirmant sa « responsabilité » de s’attaquer à cet enjeu « à la jonction des enjeux fondamentaux de dignité humaine, de sécurité et de réforme de nos institutions ».
Découvrez son plaidoyer sur la vidéo ci-dessous.