🔴VIDÉO–9E SYMPOSIUM DES CHEFS D’ÉTAT-MAJOR DE MARINE ET COMMANDANTS DE GARDE-CÔTES DU GOLFE DE GUINÉE : UNE NOUVELLE VISION POUR LA SÉCURITÉ MARITIME ATLANTIQUE
Dakar accueille une initiative stratégique majeure pour redéfinir la coopération navale régionale
Dakar s’est positionné comme capitale de la diplomatie maritime africaine le 18 novembre 2025, en accueillant la cérémonie d’ouverture du 9e Symposium des Chefs d’État-Major de Marine et Commandants de Garde-Côtes du Golfe de Guinée. Cette édition marque un tournant significatif dans la gouvernance maritime régionale, rassemblant 27 marines provenant d’horizons géographiques et diplomatiques variés.
Le Sénégal a reçu l’honneur d’organiser ce rassemblement lors de la précédente édition, témoignage de la confiance que les nations côtières accordent à la diplomatie sénégalaise. Selon le capitaine de vaisseau Djibril DIAWARA, chef de la chaîne emploi de l’état-major de la Marine Nationale sénégalaise, cette sélection reflète la position du pays comme interlocuteur fiable dans les enjeux de sécurité maritime.
L’Architecture de Yaoundé : Une Structure en Évolution
Le symposium s’inscrit dans le cadre de l’Architecture de Yaoundé un mécanisme de coopération établi en 2013 pour assurer la sécurité des activités économiques dans le Golfe de Guinée. Cette architecture englobe les états côtiers s’étendant du Sénégal à l’Angola, incluant le Burundi, et s’appuie sur trois piliers institutionnels : la CEDEAO (Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest), la CEMAC (Communauté Économique et Monétaire de l’Afrique Centrale), et la Commission du Golfe de Guinée
Depuis sa création, l’architecture a connu des évolutions substantielles. Elle a mis en place des centres régionaux de coordination facilitant l’échange d’informations entre différentes régions, ainsi que des centres maritimes multinationaux de coordination opérant dans les zones désignées A, D, E, F et G. Ces structures permettent aux marines participantes de coordonner leurs opérations de manière harmonisée, renforçant ainsi l’efficacité des réponses aux menaces maritimes communes.
Un Tournant Stratégique : Au-Delà des Frontières Régionales
Le 9e symposium cristallise une mutation fondamentale dans la pensée stratégique maritime régionale. Selon le capitaine DIAWARA, l’architecture doit désormais regarder vers le large et envisager la coopération au-delà des limites traditionnelles du Golfe de Guinée. Cette expansion stratégique représente une reconnaissance que les défis maritimes contemporains dépassent les frontières régionales et que les solutions doivent être pensées à l’échelle du bassin atlantique.
Cette évolution inclut l’engagement de nations africaines côtières historiquement en dehors du cadre institutionnel : le Maroc, la Mauritanie, la Namibie et l’Afrique du Sud. Toutes ces marines sont représentées au symposium, signalant une volonté de construire une solidarité maritime panafricaine le long du littoral atlantique.
Une Participation Transatlantique Inédite
L’originalité de cette édition réside dans sa composition véritablement transatlantique. Au-delà des acteurs africains, le symposium accueille des représentants du Brésil, des États-Unis et de plusieurs nations européennes, notamment la France et le Portugal. Cette diversité géographique et diplomatique témoigne de l’intérêt stratégique que suscite la stabilité maritime du Golfe de Guinée au niveau mondial.
Cette présence internationale reflète également les enjeux géopolitiques actuels : le Golfe de Guinée demeure une zone cruciale pour le commerce maritime mondial, traversée par des routes commerciales essentielles et riche en ressources halieutiques et énergétiques.
Vers une Stratégie Atlantique Autonome du Golfe de Guinée
Au cœur des débats du symposium se trouve une question stratégique majeure : comment les États du Golfe de Guinée peuvent-ils élaborer leur propre vision et leurs objectifs atlantiques plutôt que de simplement réagir aux initiatives extérieures ?
Jusqu’à présent, la dynamique a souvent été inversée. Des puissances externes formulent des propositions de coopération que les États régionaux acceptent, principalement pour atteindre les objectifs de ces puissances. Le capitaine DIAWARA a explicitement identifié ce déséquilibre et plaidé pour un renversement de cette logique.
Le symposium vise ainsi à créer une réflexion collective permettant aux États côtiers du Golfe de Guinée d’identifier leurs propres objectifs maritimes et d’élaborer des stratégies cohérentes pour les atteindre. Ces objectifs pourraient inclure la lutte contre la piraterie, la sécurisation des routes commerciales, la protection des ressources marines, la gestion durable de la pêche, et la prévention du trafic illégal.
En développant une stratégie atlantique autonome, les États du Golfe de Guinée pourraient également établir des partenariats plus équilibrés avec les nations africaines, américaines et européennes, fondés sur le respect mutuel et des intérêts partagés plutôt que sur l’acceptation de priorités externes.
Une Économie Maritime en Émergence
Au-delà des enjeux de sécurité régalienne, le symposium illustre l’émergence d’une économie maritime sénégalaise et ouest-africaine. En marge des travaux formels, les organisateurs ont mis en place une exposition d’équipements militaires et maritimes, reflétant la convergence entre les secteurs de la défense et de l’économie maritime.
Cette exposition accueille les grands constructeurs navals et les sociétés spécialisées dans les applications maritimes, mais également les acteurs institutionnels comme l’Agence Nationale des Affaires Maritimes et le Port Autonome de Dakar.
L’élément le plus remarquable reste cependant la présence de entreprises sénégalaises d’innovation maritime : DMI, Solutronique, et Ngom et Frères. Ces entreprises, actives dans le secteur maritime et les applications technologiques marines, démontrent une expertise locale naissante mais prometteuse. Leur participation au symposium signale que le Sénégal ne se contente plus d’importer des solutions maritimes, mais commence à développer une capacité endogène de production d’équipements et de services maritimes.
Cette dynamique entrepreneuriale pourrait constituer le fondement d’une industrie maritime sénégalaise compétitive, générant à terme de l’emploi qualifié, des exportations technologiques, et une plus grande autonomie dans la gestion des enjeux maritimes régionaux.
Un Moment Décisif pour la Gouvernance Maritime Atlantique
Le 9e Symposium des Chefs d’État-Major de Marine et Commandants de Garde-Côtes du Golfe de Guinée représente bien plus qu’une simple réunion diplomatique. Il constitue un moment décisif dans la redéfinition de la coopération maritime régionale et de l’affirmation d’une autonomie stratégique africaine face aux enjeux atlantiques.
En accueillant cette initiative, le Sénégal réaffirme son rôle de pivot diplomatique en Afrique de l’Ouest et son engagement envers la sécurité maritime collective. Simultanément, le symposium incarne une aspiration plus large : celle des États côtiers du Golfe de Guinée à définir leurs propres priorités stratégiques et à bâtir une coopération maritime fondée sur des intérêts régionaux partagés.
À travers les débats qui s’y déroulent et les partenariats qui s’y nouent, ce symposium crée les conditions pour une transition vers une gouvernance maritime atlantique plus équilibrée, où les voix africaines occuperaient une place centrale dans la définition des stratégies de sécurité et de développement maritime.
Découvrez sur la vidéo ci-dessouses explications du capitaine de vaisseau Djibril CAMARA.
