ABROGATION DE LA LOI D’AMNISTIE : LA LD REJETTE « UNE JUSTICE SÉLECTIVE » ET ESTIME QUE « LA VÉRITÉ NE SE FRAGMENTE PAS »
Dans un communiqué transmis à nos soins ce lundi 24 mars 2025, la Ligue Démocratique (LD) soulève plusieurs questions cruciales tant sur la politique intérieure du Sénégal que sur diverses crises humanitaires et politiques qui secouent le continent africain. Ce document, ferme et sans concession, réaffirme les positions du parti sur la controversée loi d’amnistie au Sénégal, dénonce la persécution des populations peuhles au Sahel, alerte sur la famine au Soudan, et salue timidement les efforts de dialogue dans la région des Grands Lacs.
La controverse persistante sur la loi d’amnistie au Sénégal
La Ligue Démocratique maintient sa position historique d’opposition à la loi d’amnistie, tout en s’opposant désormais à ce qu’elle qualifie « d’abrogation sélective ». Cette position s’inscrit dans la continuité de ses déclarations antérieures, puisque déjà fin 2024, le parti exigeait « la lumière sur tous les événements meurtriers qui ont secoué le pays entre 2021 et 2024 ». La LD avait alors plaidé pour l’abrogation de cette « loi inique » et réclamé des enquêtes pour identifier et condamner les responsables des violences ayant causé des dizaines de morts.
Ce positionnement intervient dans un contexte législatif en évolution, puisque l’Assemblée nationale sénégalaise s’apprête à examiner, une proposition de loi visant à clarifier l’interprétation de la loi d’amnistie. Cette initiative, portée par le député Amadou BA du parti Pastef, a déjà reçu un avis favorable du président de l’Assemblée nationale, El Malick NDIAYE.
La LD rejette catégoriquement toute approche partielle ou partisane de cette question, estimant que « la vérité ne se fragmente pas » et que « la justice ne s’accommode d’aucune sélectivité ». Le parti exige une cohérence totale : soit maintenir l’amnistie dans son intégralité, soit l’abroger complètement, mais refuse ce qu’il considère comme une instrumentalisation politique de la justice.
La dénonciation du « génocide silencieux » contre les Peulhs au Sahel
Le communiqué consacre une section entière à ce que la Nicolas NDIAYE et ses camarades qualifient de « génocide silencieux » contre les populations peuhles au Mali et au Burkina Faso. Cette dénonciation trouve un écho factuel dans les événements récents survenus à Solenzo, dans l’ouest du Burkina Faso, où des exactions ont été commises contre des civils peuls entre le 10 et le 11 mars 2025.
Selon des témoignages recueillis par l’AFP, « des familles entières de bergers, des Peuls, ont été tuées dans les brousses de Solenzo, dans les zones de Bema et Ban ». Des vidéos circulant sur les réseaux sociaux montrent des dizaines de corps ensanglantés, principalement des femmes, des enfants et des personnes âgées, les pieds et les mains ligotés, victimes d’hommes armés se présentant comme des « Groupes d’autodéfense ».
La Ligue Démocratique dénonce « l’indifférence coupable des grandes puissances et le mutisme complice de certains États africains » face à ces violences, et appelle à des enquêtes indépendantes ainsi qu’à des poursuites judiciaires contre les responsables de ces atrocités.
La crise humanitaire majeure au Soudan
Le communiqué de la LD alerte également sur la situation dramatique au Soudan, où une famine sévère s’aggrave dans l’indifférence internationale.
Cette analyse s’appuie sur des données alarmantes : selon Médecins Sans Frontières (MSF), 24,6 millions de personnes, soit plus de la moitié de la population soudanaise, sont confrontées à des niveaux élevés d’insécurité alimentaire aiguë, dont 8,5 millions en situation d’urgence ou de famine.
La gravité de cette crise est également soulignée par le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, qui a exprimé son inquiétude face à la détérioration rapide de la situation alimentaire dans le pays. La famine touche déjà cinq régions du Soudan, notamment le camp de déplacés de Zamzam dans le Darfour Nord et certaines zones des monts Nuba occidentaux, avec des projections indiquant que cinq autres zones risquent d’être touchées entre décembre 2024 et mai 2025.
La LD qualifie cette situation de « crime par omission » et appelle à des « actions humanitaires immédiates et une mobilisation diplomatique forte » pour éviter un « désastre irréversible ».
Au-delà de l’indignation : l’appel à l’action
Face à ces multiples crises, la Ligue Démocratique ne se contente pas de dénoncer mais formule un appel à l’action concrète. Le parti exhorte à « faire pression sur les gouvernants et les institutions internationales » et à « dénoncer avec force et constance les injustices dans tous les forums nationaux et internationaux ».
Cette position s’inscrit dans un contexte où les difficultés d’acheminement de l’aide humanitaire sont flagrantes. MSF souligne que pour fournir des rations alimentaires uniquement aux personnes les plus à risque au Soudan, il faudrait 2 500 camions d’aide par mois, alors qu’en moyenne seuls 230 ont pu entrer chaque mois au Darfour entre août et décembre 2024. L’organisation dénonce également l’inaction qu’elle qualifie de « choix qui tue ».
Une lueur d’espoir dans la région des Grands Lacs
Dans sa conclusion, le communiqué de la LD adopte un ton plus optimiste en saluant les efforts de dialogue entre les présidents du Rwanda et de la République Démocratique du Congo. Ce commentaire intervient dans un contexte extrêmement tendu, marqué par la prise de Goma par les rebelles du M23 soutenus par le Rwanda.
Cette situation a provoqué une pression accrue des chancelleries occidentales sur Kigali pour obtenir le retrait des troupes rwandaises. Malgré l’hostilité des autorités congolaises qui refusent catégoriquement tout dialogue avec le M23, qualifié de « terroriste » par le président Félix Tshisekedi, certains observateurs comme François Soudan, directeur de la rédaction de Jeune Afrique, estiment que « le règlement d’un conflit, même si on en est la victime, passe inéluctablement par des négociations ».
La LD s’aligne sur cette position en appelant à transformer cette initiative de dialogue « en un processus durable » de réconciliation entre les deux pays.
Un parti d’opposition qui affirme sa vision panafricaine
Ce communiqué positionne clairement la Ligue Démocratique non seulement comme un acteur de la politique sénégalaise, mais aussi comme une voix qui s’exprime sur les enjeux continentaux. À travers ses prises de position sur la justice transitionnelle au Sénégal, les violences ethniques au Sahel, la crise humanitaire au Soudan et les conflits dans les Grands Lacs, la LD développe un discours qui transcende les frontières nationales pour embrasser une vision panafricaine.
La fermeté du ton, l’appel à l’action concrète et l’insistance sur la cohérence des principes traduisent la volonté du parti de se démarquer comme une force politique de proposition, capable d’articuler une critique constructive des situations de crise et d’offrir des perspectives de solution.
